Thibault Verbiest, avocat et président de Paytend, apporte des éléments de réponses, en commençant par resituer le contexte de ce dossier riche en rebondissements.
Les banques et les crypto-acteurs sont à la croisée des routes. Le marché crypto s’est développé non sans générer des craintes au sein du secteur financier classique. Avec l’arrivée de MiCA et l’annonce d’une réglementation sur le sol américain, l’heure semble être venue pour rassurer chaque partie, avec pour objectif la mise en place de collaborations au service des entreprises et des particuliers. Alors que les avancées technologiques ne connaissent pas de frein, la question est de savoir comment les banques et les acteurs de la scène crypto vont pouvoir sceller leur inévitable union, afin de former un socle indispensable à l’innovation.
Plusieurs raisons expliquent cette méfiance. D’une part, les banques sont soumises à des réglementations strictes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (AML/CFT). Or, les cryptomonnaies, en raison de leur nature pseudonyme, sont perçues comme un vecteur potentiel d’activités illicites. Ensuite, avant l’adoption du règlement MiCA, il n’existait pas de cadre réglementaire clair en Europe pour encadrer les crypto-actifs, ce qui compliquait leur acceptation par les banques.
Enfin, la volatilité du marché crypto, les faillites retentissantes comme celle de FTX et la concurrence que représente la finance décentralisée (DeFi) pour le système bancaire traditionnel ont également contribué à ce climat de défiance. Les banques considèrent souvent les cryptos comme un marché risqué et potentiellement déstabilisant pour leur propre modèle économique.
L’une des principales difficultés est l’accès aux services bancaires. De nombreuses entreprises crypto peinent à ouvrir un compte bancaire et, lorsqu’elles y parviennent, elles s’exposent au risque de fermeture soudaine sans préavis. Cela complique leur gestion financière et impacte la continuité de leurs opérations.
De plus, certaines transactions peuvent être bloquées ou subir des retards importants, rendant les paiements et les transferts de fonds plus complexes. Ces difficultés opérationnelles entravent le développement des entreprises crypto et peuvent même mettre en péril leur activité.
Certaines entreprises se tournent alors vers des solutions alternatives comme les plateformes de paiement en cryptomonnaies ou les stablecoins, mais ces options ne permettent pas toujours d’avoir une intégration fluide avec le système financier traditionnel.
Les établissements de monnaie électronique (EMI) comme Paytend, Revolut et d’autres fintechs ont émergé comme une solution viable. Contrairement aux banques, les EMI ne collectent pas de dépôts protégés par un fonds de garantie, mais offrent des services de paiement et de gestion de monnaie électronique adaptés aux besoins des entreprises crypto.
Elles sont généralement plus ouvertes aux innovations technologiques et ont des réglementations plus souples, ce qui leur permet d’accompagner plus facilement les acteurs crypto. De plus, elles sont souvent mieux préparées pour répondre aux exigences du règlement MiCA, ce qui leur permet d’intégrer progressivement les entreprises crypto dans un cadre régulé.
MiCA apporte enfin un cadre réglementaire harmonisé en Europe. Désormais, les prestataires de services sur crypto-actifs (PSCA) doivent obtenir une autorisation réglementaire pour exercer. Cela renforce la sécurité et la transparence du marché.
Il impose également des obligations strictes en matière de conformité AML/KYC, ce qui rassure les institutions financières et facilite l’intégration des entreprises crypto dans l’écosystème financier traditionnel.
Enfin, MiCA introduit des exigences spécifiques pour les stablecoins afin d’assurer leur stabilité et leur adoption plus large. Ces nouvelles règles devraient permettre d’atténuer certaines craintes des banques et encourager un rapprochement entre finance traditionnelle et crypto-actifs.
Notons aussi qu’aux Etats-Unis, le vent tourne et que le secteur crypto devrait être soumis à une réglementation plus favorable.
Oui, et nous voyons déjà des évolutions en ce sens. Certaines banques, comme Société Générale via sa filiale SG Forge, ont lancé des stablecoins adossés à l’euro. En France, Banque Delubac & Cie propose des services pour les investisseurs crypto. En Espagne, des banques comme CaixaBank, Santander et BBVA prévoient d’intégrer des services de trading crypto d’ici 2025.
Ce sont des signes encourageants qui montrent que les banques commencent à adapter leurs offres pour répondre à cette demande croissante. À terme, il est possible que les institutions financières classiques développent des services spécifiquement dédiés aux entreprises crypto et aux particuliers souhaitant investir dans ces actifs.
Paytend se positionne comme un acteur clé dans cette transition en offrant aux entreprises crypto un accès sécurisé et conforme aux services financiers. Nous proposons notamment des IBAN dédiés pour les acteurs du secteur, facilitant ainsi leurs transactions tout en respectant les exigences réglementaires.
De plus, nous avons développé une offre innovante avec des cartes Mastercard qui peuvent être chargées en crypto. Ces cartes permettent aux utilisateurs de convertir instantanément leurs actifs numériques en monnaie fiduciaire et de les utiliser partout où Mastercard est accepté. C’est une solution qui répond à un besoin croissant : pouvoir utiliser ses cryptos au quotidien sans contraintes.
Notre objectif est de créer un pont entre le monde des cryptos et la finance traditionnelle, en apportant des solutions adaptées aux nouveaux défis du marché. Avec l’évolution du cadre réglementaire et l’acceptation progressive des cryptos, nous sommes convaincus que ces solutions deviendront la norme.
Avec l’entrée en vigueur de MiCA et l’acceptation progressive des cryptomonnaies par les institutions financières, nous entrons dans une phase de normalisation. Les banques vont probablement proposer de plus en plus de services liés aux crypto-actifs, et les fintechs joueront un rôle clé pour faciliter cette transition.
Le principal enjeu reste la mise en place de solutions de conformité robustes afin de concilier sécurité, innovation et adoption massive des cryptos. Il faudra également renforcer l’éducation financière des utilisateurs pour leur permettre d’adopter ces nouvelles solutions en toute confiance.
Nous pourrions également voir émerger des partenariats stratégiques entre banques et entreprises crypto afin de proposer des services hybrides qui combinent les avantages des deux mondes. À terme, les cryptos et la finance traditionnelle ne seront plus en opposition, mais complémentaires.
Le secteur crypto évolue rapidement et la régulation est en train de structurer le marché de manière plus pérenne. Nous assistons à un rapprochement progressif entre banques et crypto-acteurs, ce qui ouvre des perspectives intéressantes pour l’innovation et la démocratisation des actifs numériques.
L’avenir s’annonce prometteur, à condition que les acteurs du marché et les régulateurs continuent à travailler main dans la main. Les fintechs comme Paytend ont un rôle clé à jouer dans cette transition, en proposant des solutions adaptées aux besoins des entreprises et des particuliers.