Découvrez l'article de Claire Serraz, Consultante Data chez Nexialog Consulting.
Les fintechs, entreprises exploitant des technologies avancées telles que l’intelligence artificielle (IA), le big data ou la blockchain, bouleversent le paysage financier traditionnel. En offrant des services innovants, rapides et souvent moins coûteux, elles remettent en question la domination historique des banques et des compagnies d’assurance. Ce phénomène soulève une question cruciale : assistons-nous à une cohabitation harmonieuse entre ces nouveaux acteurs et les institutions traditionnelles, ou est-ce la substitution inéluctable de ces dernières ?
L’essor des fintechs
Les fintechs jouent un rôle crucial en modernisant le secteur financier, introduisant des solutions plus rapides, plus efficaces, souvent moins coûteuses et donc plus accessibles que celles proposées par des institutions bancaires traditionnelles telles que BNP Paribas ou Société Générale ainsi que des compagnies d’assurance comme AXA ou Allianz. Ces dernières institutions ont longtemps dominé le marché grâce à leur stabilité, leur confiance établie et leurs vastes réseaux de clients. Cependant, suite à la crise financière de 2008, ces institutions ont perdu en crédibilité et se sont retrouvées en difficulté, permettant aux fintechs, qui commençaient à émerger, de voir leur croissance exploser à vitesse exponentielle. Depuis, la digitalisation croissante et l’essor des smartphones ont favorisé l’émergence des solutions financières alternatives, telles que Revolut et N26, marquant un tournant dans le secteur. Ainsi, en 2023, plus de 52% des fintechs française ont ainsi réalisé un chiffre d’affaires de plus d’un million d’euros, contre 50% en 2022.
La substitution des acteurs financiers traditionnels par les fintechs est-elle inévitable ?
Les fintechs, grâce à leur agilité et à leur rapidité d’adaptation, répondent plus efficacement aux besoins changeants des consommateurs. Contrairement aux banques traditionnelles, souvent freinées par des protocoles rigides et des systèmes informatiques obsolètes, elles peuvent déployer rapidement de nouvelles solutions technologiques. Par exemple, des néo-banques comme Revolut et N26, entièrement digitales, attirent de plus en plus de clients grâce à leurs services bancaires innovants accessibles via des applications mobiles intuitives. Ces néo-banques offrent des fonctionnalités telles que des comptes multidevises, des paiements internationaux sans frais cachés, et des outils de gestion des dépenses en temps réel, répondant ainsi aux attentes des consommateurs modernes.
De plus, les fintechs bénéficient souvent de coûts d’exploitation inférieurs, leur permettant de proposer des tarifs plus compétitifs. Par exemple, des solutions de paiement comme PayPal et Stripe ont révolutionné le secteur des paiements en ligne en offrant des services rapides, sécurisés et à moindre coût. Ces plateformes permettent aux entreprises de toutes tailles d’accepter des paiements en ligne sans les frais élevés associés aux services traditionnels. Cette efficacité opérationnelle et cette réduction des coûts positionnent les fintechs de manière favorable face aux banques traditionnelles. Au Mexique notamment, le taux d’adoption des services fintech est supérieur à celui des comptes bancaires traditionnels, dès 2023.
Ces exemples de disruption montrent comment les fintechs peuvent non seulement rivaliser, mais aussi potentiellement remplacer les acteurs financiers traditionnels en offrant des services mieux adaptés aux besoins contemporains. Cependant, une substitution totale semble encore ambitieuse, car les banques traditionnelles bénéficient d’un plus large portefeuille de clients qui leur font confiance.
Une collaboration peut-elle être envisagée ?
Les collaborations entre fintechs et acteurs financiers traditionnels se multiplient, créant une synergie bénéfique pour les deux parties. Par exemple, en 2018, le Crédit Mutuel s’est associé à IBM pour intégrer des solutions d’intelligence artificielle, ce qui a permis d’améliorer l’efficacité opérationnelle et la satisfaction client. De même, en 2017, BNP Paribas a acquis la néo-banque Compte-Nickel, élargissant ainsi son offre digitale et facilitant l’accès aux services bancaires pour une clientèle diversifiée. En outre, la fintech Credit Karma collabore avec plusieurs banques traditionnelles pour exploiter des données agrégées et proposer des offres de crédit personnalisées.
Ces partenariats permettent aux fintechs de bénéficier de l’infrastructure solide et de la confiance des banques traditionnelles, tout en offrant à celles-ci l’agilité et l’innovation caractéristiques des fintechs. Ensemble, ils peuvent fournir des services financiers plus rapides, personnalisés et efficaces, tout en réduisant les coûts et les risques liés au développement de nouvelles technologies.
Cependant, ces collaborations peuvent également rencontrer des obstacles. Les fintechs, avec leur rapidité d’innovation, peuvent entrer en conflit avec les processus rigides et souvent lents des banques traditionnelles. Tandis que les banques cherchent à maintenir une stabilité réglementaire, les fintechs privilégient une innovation rapide et la prise de risques. Notamment, les fintechs sont confrontées à la Directive sur les Services de Paiement 2 (DSP2), qui vise à renforcer la sécurité des paiements en ligne et à protéger les consommateurs. Les fintechs font aussi face à la Réglementation Générale sur la Protection des Données (RGPD), ou encore la lutte contre le blanchiment d’argent (AML). Ces exigences peuvent poser des défis en matière de sécurité et de conformité. En 2020, la fintech allemande Wirecard a été impliqué dans une fraude comptable massive, avec des milliards d’euros manquants, révélant les défis de la régulation et de l’encadrement des fintechs à l’échelle internationale.
Vers une cohabitation ?
La possibilité d’une cohabitation harmonieuse entre fintechs et banques traditionnelles apparaît comme une voie prometteuse pour l’avenir. Les deux partis sont confrontés à des défis distincts : les fintechs doivent faire face à un besoin de conformité, de réglementation, quand les acteurs financiers traditionnels se doivent de moderniser leur protocole rigide et adopter une culture d’innovation.
De plus, les fintechs et les banques traditionnelles ne ciblent pas la même clientèle. Les fintechs ciblent principalement les jeunes adultes et les utilisateurs technophiles qui recherchent des solutions financières innovantes. Elles s’adressent surtout à des segments de clientèle spécifique. Par exemple, Revolut et N26 permettent aux jeunes, plus sensibles aux voyages, d’effectuer des paiements internationaux sans frais. Au contraire, les banques traditionnelles, ne ciblent pas un public spécifique. Ils incluent les particuliers, les professionnels et les entreprises. Notamment, elles mettent l’accent sur la sécurité, la confiance et la proximité avec leurs clients, grâce à un réseau d’agences physiques et des conseillers financiers disponibles. Les banques traditionnelles attirent ainsi des clients privilégiant la stabilité et la sécurité des fonds, ainsi que ceux qui besoin de services financiers complexes (investissements à long terme, prêts hypothécaires, …).
De nombreux clients ont aussi opté pour une utilisation des deux partis : ils utilisent d’une part les banques traditionnelles pour par exemple la réception des revenus, la gestion de l’épargne, la souscription à un crédit, et d’autres parts ils utilisent une néo-banque pour gérer les dépenses du quotidien avec une actualisation en temps réel, les dépenses à l’étranger, l’utilisation de la cryptomonnaie, …
L’avenir du secteur financier semble donc s’orienter vers un modèle hybride où fintechs et banques traditionnelles coexistent et collaborent. Cette approche permettrait de maximiser les avantages de chaque acteur, offrant ainsi une expérience utilisateur enrichie et adaptée aux besoins diversifiés des consommateurs.
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