Retrouvez Matthieu Maurin, CEO et Co-fondateur et Pierre-Olivier Haye, CTO et Co-fondateur d’Iceberg Data Lab
Le Portrait du mois par FINANCE INNOVATION
Propos recueillis par Marie Cornet-Ashby
Matthieu Maurin : En effet, j’ai commencé ma carrière professionnelle dans ces deux secteurs qui partagent le point commun de l’impact, et plus précisément de leur impact environnemental ! Au sein du groupe très emblématique qu’est EDF ; ces questions d’impact, de dépendance, de sécurité énergétique, d’approvisionnement et d’accessibilité de l’énergie pour tous sont des enjeux majeurs…Sur le même principe, le secteur financier représente la tour de contrôle de l’allocation des flux de capitaux dans l’économie. Et lors de comités de crédit auxquels j’ai pu participer, la question de la responsabilité de l’impact de nos décisions à travers ce choix d’allocations s’est manifestement posée. L’évolution de la prise en compte de l’approche ESG, avec des outils de mesures adaptés, a été un fil rouge de mon parcours…
Matthieu Maurin : J’ai collaboré au sein de BNP Paribas, et j’ai notamment été chef de projet d’un outil le CSR Screening, servant pour cette institution à mesurer les risques ESG de ses contreparties. Le sujet de la donnée est devenu central… Et le constat du manque de données de qualité en réponse à la problématique m’a conduit au monde de la Data. J’ai voulu alors construire une solution, en développant les solutions de données susceptibles d’être intégrées dans les processus de décision d’une institution financière soucieuse de son impact ! En fait, apporter une réponse scientifique et opérationnelle à un besoin de transformation de l’économie pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris et lutter contre l’érosion de la biodiversité.
Matthieu Maurin : Cette envie de travailler sur la donnée m’a amené à rejoindre une société de conseil environnemental de référence. Et le constat partagé et répandu, du manque de données disponibles pour l’ensemble du secteur financier, a contribué en partie à faire mûrir mon projet. Ce besoin devait être approché avec une vision technologique, eu égard à la nécessité d’avoir des solutions industrialisables, et donc en ligne avec la transformation numérique à l’œuvre dans le secteur. Par ailleurs, les informations disponibles se sont multipliées, par exemple, les données satellites et d’autres sources de données non structurées, permettant d’aller très loin dans l’identification d’une activité, et donc dans l’impact des sociétés !
D’où notre projet de capitaliser sur deux grandes compétences : l’excellence dans la modélisation environnementale et dans la maîtrise des Nouvelles Technologies de l’Information (Big Data, Machine Learning). La Fintech Iceberg Data Lab est fondée sur cet axe stratégique en réponse aux fortes attentes des institutions financières ; elle s’est donnée la gouvernance et les moyens de son ambition d’être un acteur global.
Pierre-Olivier Haye : J’ai été convaincu très vite de rejoindre Matthieu… Selon moi, ces sujets environnementaux doivent être traités par des ingénieurs du fait de la complexité du problème à modéliser. Et l’on critique souvent la finance pourtant essentielle à l’économie ! Au-delà des challenges techniques passionnants, parvenir à rendre service et à améliorer l’état de la planète me motive aussi pleinement. L’IT est un outil qui m’a permis d’explorer différents secteurs, et d’être le CTO de Gault & Millau et d’En Voiture Simone.
Iceberg Data Lab couvre un champ très profond qui intègre la complexité de la finance et de la modélisation environnementale… Notre Fintech est structurée autour de deux équipes : celle de la recherche et de l’analyse dans le domaine de l’environnement, et celle de l’IT sur les sujets d’industrialisation, de modélisation et d’intégration des outils. Deux mondes complémentaires, en dialogue permanent ; un enrichissement stimulant avec des réalisations très concrètes.
Matthieu Maurin : La responsabilité sociale de notre société est de contribuer à la réallocation des flux de capitaux vers des secteurs plus durables. La finance est le levier qui fait bouger le monde ; Iceberg Data Lab fournit des informations permettant d’aiguiller ce secteur vers des directions plus durables pour la planète. L’impact de nos données nous oblige aussi à l’exemplarité en termes de transparence et de gouvernance.
Pierre-Olivier Haye : Notre Fintech a été pensée sur un sujet spécifique, celui de la biodiversité sous-servi à l’époque dans le monde de la Data ESG. En remportant différents appels d’offres, nous avons pu lancer Iceberg Data Lab. Et nous avons développé une solution de l’impact des politiques d’achat et des productions des sociétés, pour définir un indicateur d’impact négatif sur la biodiversité appelé CBF (« Corporate Biodiversity Footprint »). En complément, nous avons intégré un indicateur climat ou SB2A, offrant l’opportunité à une société de connaître son alignement sur les Accords de Paris. Grâce à ces informations rapportées ou modélisées, il nous est possible de fournir d’autres indicateurs environnementaux, à titre d’exemple la part verte selon la taxonomie européenne. Notre modèle, baptisé Wunderpus, calcule tous ces impacts environnementaux directs et indirects des entreprises. C’est l’autre enjeu d’Iceberg Data Lab, celui d’intégrer les data des sociétés que l’on va analyser et structurer afin de leur donner du sens.
Matthieu Maurin : Notre plateforme utilise l’ensemble de ce savoir-faire technologique afin d’intégrer des modèles de comptabilité environnementale (climat et biodiversité) ! Les solutions opérationnelles proposées à nos clients, sont bâties à partir de questions simples et intelligibles par des experts ou non. À titre d’exemples : Est-ce je finance des sociétés exposées à de la déforestation ? Mon portefeuille est-il aligné avec les Accords de Paris ? Pour répondre à ces questionnements, notre offre a été construite sur 3 axes : le climat, la biodiversité, les scores verts.
Par la suite, Iceberg Data Lab s’est dotée de solutions visant à couvrir des besoins spécifiques : le Reporting, avec les indicateurs environnementaux très concrets demandés par la réglementation européenne aux institutions financières ; la gestion de risques, avec des scores d’évaluation de risques climat. D’un point de vue de l’investisseur, cela signifie de connaître le risque induit ou subi par le portefeuille d’une institution financière. Et donc aussi, la manière dont celles-ci peuvent être appréciées en termes de score si l’on se positionne par rapport à une trajectoire de référence ou bien à une référence sectorielle globale. Nos indicateurs visent à répondre de manière précise, concrète et opérationnelle à des attentes très différentes : l’alignement d’un fonds d’infrastructures sur les Accords de Paris, les risques climat d’une grande banque, le calcul des impacts des contreparties d’un Asset Manager, la volonté de fonds de gestion passive de construire un portefeuille à faible impact sur la nature, etc.
Pierre-Olivier Haye : La diversité des points de vue est un véritable enrichissement ! Quand les modélisateurs ont des positions très pointues, l’IT a une vision des sujets plus macro. Grâce à la puissance de notre algorithme et l’accès à la Data, des informations inaccessibles sont transmises à nos analystes. Et l’équipe est en capacité de s’emparer d’un sujet, de le modéliser et l’industrialiser.
Matthieu Maurin : Notre richesse réside dans les profils et donc aussi les différentes filières dont sont issus nos collaborateurs. Une grande complémentarité de savoir-faire est essentielle dans notre activité. Iceberg Data Lab respecte aussi la parité, et son aspect international avec plus de 9 nationalités différentes est très apprécié.
Matthieu Maurin : Quatre institutions de premier plan avaient lancé un appel d’offres, et nous l’avons remporté avec la société de conseil I Care & Consult. L’objet étant de développer des solutions de données sur la biodiversité. Au regard de notre feuille de route, nos travaux sur les indicateurs d’impact sont finalisés, et nous livrerons prochainement les indicateurs de dépendance. La prochaine étape sera celle de l’impact positif. En d’autres termes, la façon d’isoler plus spécifiquement la contribution positive de certaines sociétés, par rapport à leurs pairs, sur la préservation de la biodiversité.
Au-delà de ce partenariat emblématique de développement de solutions de mesures d’empreinte, un partenariat a été mis en place avec Euronext dans le but de fournir des indices intégrant la prise en compte de la biodiversité. Les premiers résultats concrets sont l’indice et les ETF lancés il y a quelques semaines par HSBC et BNP Paribas AM.
Iceberg Data Lab participe aussi à des partenariats académiques et scientifiques, par exemple avec la FRB, en rejoignant l’Assemblée des parties prenantes. L’objectif est de participer aux efforts de recherche sur le sujet des mesures d’impact sur la biodiversité, et en apportant notre savoir-faire et notre retour d’expérience sur la fabrication d’indicateurs de mesure d’impact destinés aux institutions financières. Je suis très soucieux que notre Fintech participe concrètement à l’effort de recherche sur ce domaine où tant reste à faire.
Notre partenariat avec la NEC SA a été scellé dans le but de développer des calculateurs et des données permettant de produire cette métrique holistique de mesure de l’impact carbone et environnementale des sociétés.
Matthieu Maurin : On a clôturé une série A de 5 millions d’euros en juillet 2021 grâce à un consortium d’investisseurs stratégiques AXA IM, Natixis IM, Sienna Investment Managers et Solactive AG. Le constat partagé était que notre plateforme robuste répondait aux besoins et aux attentes des institutions financières de façon générale. Notre objectif visait une accélération du développement de la société sur sa feuille de route produit, et la poursuite de l’expansion du secteur commercial en France et… à l’international au plus près des principaux hubs financiers de la planète ! Aujourd’hui, le chiffre d’affaires à l’international représente 30 % de nos ventes. Après l’ouverture d’un bureau à Francfort, nous déployons une nouvelle équipe à Londres…
Pierre-Olivier Haye : Cette levée de fonds nous a permis de sortir notre plateforme client, un écrin fonctionnel et opérationnel pour présenter nos modèles ! En 2023, l’interface client va être remise à jour en y intégrant : nos nouveaux produits sur la taxonomie européenne puis, des indicateurs de dépendance. En termes de fonctionnalité, les calculs ont été optimisés et l’accès à l’information pour nos analystes facilitée rendant la dashboard agréable et efficace !
Matthieu Maurin : Iceberg Data Lab souhaite continuer à capitaliser sur cette plateforme en réponse à des nouvelles attentes réglementaires. Nous voulons aussi être en capacité, de mettre à disposition via un logiciel SaaS nos calculateurs de mesure d’empreinte carbone et de biodiversité à des consultants. L’objectif étant de les aider auprès des corporates dans leur stratégie.
Iceberg Data Lab est très soucieuse de ses clients. Dans la croissance de notre société, l’intégration de nouveaux collaborateurs ou partenaires, passera nécessairement par leur formation et leur compréhension de nos outils. Nos solutions évolueront face aux besoins d’un marché en forte progression, cela nous impliquera pleinement avec une grande réactivité vis-à-vis de nos clients et de leurs attentes.
Notre stratégie est de créer le champion européen de la Smart Data ESG. Cela signifiera d’étendre plus largement notre dispositif commercial avec des équipes formées à nos solutions et de mobiliser les ressources et les partenaires pour accélérer davantage. Notre entreprise est en phase d’accélération, et il y a beaucoup d’attente sur le secteur ! Nous nous donnerons les moyens d’être au rendez-vous …
Pour en savoir plus sur Iceberg Data Lab : https://icebergdatalab.com/
Source : Propos recueillis par Marie Cornet-Ashby pour Finance Innovation